
Le Héron et la Couleuvre
Scène photographiée et filmée sur la réserve Terre d’Oiseaux à Ciers-sur-Gironde.
Également disponible sur YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=cd0G6UFxrRI&t=5s

Le héron et la couleuvre
Un héron au long bec, emmanché d’un long cou
Sur ses bien longues pattes, recherchait un bon coup.
Têtards et alevins ne feraient pas son plat,
Ils sont trop fins dit-il et bons pour les goujats.
Il espérait plus gros, une carpe, un gardon,
Gageant que Jupiter lui ferait bien ce don.
Il devrait accepter, prendre ce qu’il reçoit
On a toujours besoin d’un plus petit que soi
Alors que de manger il perdait tout espoir
Au milieu des roseaux il arrivait au soir.
Un bruit ! Un soubresaut ! Le spectre long et fin
Qui glisse entre ses pattes, pourrait calmer sa faim.
Enfin !
Il le pique, le pince, l’exhibe hors de l’eau,
Il court pour l’emporter en dehors des roseaux
Et l’emmène aussitôt sur un îlot bien sec.
C’est bien une couleuvre, conclut-il aussi sec.
Pitié, épargnez-moi, j’ai des petits au nid,
Le supplie le reptile, pour se sauver la vie.
Ventre affamé, dit-on, n’a point d’oreille,
Le héron n’entend rien à supplique pareille.
Le trophée d’Esculape il entend bien manger,
Certain que celui-ce ne mérite procès.
Il va pour le gober, mais pour où commencer,
De la tête ou la queue, lequel prendre en premier ?
La gueule, se dit-il ! Et l’avale à moitié.
Mais d’un bout jusqu’à l’autre, le serpent fait six pieds .
Et comme le mâtin du vieil alexandrin,
L’ophidien se défend par sa taille hardiment.
Tombé dans le jabot, il retourne illico,
Remonte dans le bec et ressort aussitôt.
L’échassier le voit bien, ne le laisse échapper,
Mais sait que de méthode il devra bien changer.
Par le bout le plus fin, il le pince, il le tient,
Tente de le plonger, le noyer dans son bain
La scène se répète, et se répète encor’,
Si bien que le serpent en est à moitié mort.
Mais les six pieds de long, c’est dur à avaler
Pour les ingurgiter, il faudra insister…
Tous ceux qui ont essayé d’avaler des couleuvres
Ont bien vu qu’il fallait mettre du cœur à l’œuvre.